Sécurisation des approvisionnements : quand la relocalisation est une solution
Ce sujet de relocalisation des achats n’est pas nouveau mais les crises sanitaires et géopolitiques récentes ont accéléré cette dynamique.
Les entreprises françaises exposées au risque fournisseur
En matière d’achats, la France est importatrice de biens à hauteur de 600 milliards d’euros, dont 250 milliards hors Union Européenne et cette part ne cesse de croître. Aussi, la balance commerciale française, déficitaire depuis 2003, couplée à la faible part de l’industrie dans le PIB (13,5 % en France, l’un des ratios les plus faibles d’Europe, contre près de 25 % en Allemagne) exposent les entreprises françaises à des chaînes de valeurs mondialisées.
Ces dernières sont bien conscientes de leur exposition au risque, puisqu’elles placent la gestion des risques et des crises comme une priorité stratégique pour 21 % d’entre elles, contre 11 % en moyenne au niveau mondial (Source : étude Digital Procurement 2022, PwC).
Sécuriser ses approvisionnements en réponse à la crise
Les crises sanitaires et géopolitiques que nous vivons depuis 2020 bouleversent les équilibres établis ainsi que les réalités des entreprises et des États en matière de sécurisation des approvisionnements. Aussi, la Russie représente aujourd’hui 1,6% de nos importations, essentiellement des hydrocarbures qui constituent des achats critiques et stratégiques. Or le conflit avec l’Ukraine laisse poindre le risque de pénuries et soulève la problématique de la dépendance. Depuis la crise Covid, les questions de pénurie, d’augmentation des prix et des prix de transports ou de dépendance fournisseurs sont au cœur des préoccupations des directions Achats. Les chaînes d’approvisionnement sont plus que jamais dans la tourmente et la fonction Achats est soumise à de fortes contraintes, lui demandant de sécuriser ses bases mais également de se réinventer.
Relocaliser sa production et ses approvisionnements ne constitue pas alors forcément et uniquement une réponse patriote mais bien une solution pragmatique et pérenne pour sécuriser ses chaînes d’approvisionnement.
Faire évoluer son portefeuille fournisseurs est une des réponses directes à la gestion des risques dans un contexte de contraintes environnementales et géopolitiques. À mesure que les écarts de prix se réduisent, les opportunités de relocalisation se font plus nombreuses. À plus long terme, la maîtrise de la chaîne d’approvisionnement étendue doit devenir une priorité."
Isabelle CARRADINE PINTO, Associée spécialiste de la transformation de la fonction Achats, PwC France et Maghreb
Lorsque se pose la question de la relocalisation, il convient d’en évaluer la faisabilité. L’identification de fournisseurs alternatifs se base sur plusieurs critères : le fournisseur identifié possède-t-il des capacités de production suffisantes pour répondre aux besoins de l’entreprise ? Dispose-t-il de l’expertise sectorielle, d’homologations ou même de certifications nécessaires à l’activité ou au produit en question ? La qualité est-elle au rendez-vous ? En Juillet 2020, PwC et le Centre National des Achats (CNA) ont identifié 58 catégories de produits propices à la relocalisation. Aussi, en matière de relocalisation, des alternatives sérieuses peuvent s’envisager en France dans les secteurs de la quincaillerie, des pièces métalliques, du packaging, … Pour en savoir plus sur les catégories de produits et les secteurs industriels les plus propices à une relocalisation, découvrez l'étude Relocalisation des achats stratégiques.
Une démarche accélérée par les crises, mais qui doit s'inscrire dans un processus d'amélioration continu
Les crises sont des catalyseurs de transformation, toutefois, la question de la relocalisation des achats ne doit pas s’envisager uniquement en temps de crise. Il convient également de s’inscrire dans une démarche vertueuse et menée en continu : surveiller la santé de ses fournisseurs, être en veille sur les marchés, revoir ses contrats. Cette approche systématique de revue des fournisseurs et des chaînes d’approvisionnement peut mener à l’identification d’alternatives produits lorsque les alternatives fournisseurs ne sont pas possibles. Dans cette optique, l’entreprise peut s’engager dans du bio sourcing, de la recherche d’innovation et in fine viser une amélioration de son empreinte carbone. L’un des défis soulevés par la sécurisation des approvisionnements est celui de la collaboration : les acheteurs et les fournisseurs doivent travailler de concert. L’enjeu est de regrouper la demande, pour échanger de manière constructive avec ceux qui offrent et ainsi dynamiser ses capacités de production.